La présente expérience s’est située au lycée
professionnel Camille Schneider de Molsheim (Bas-Rhin), à dominante
tertiaire, qui accueille quatre-cent-soixante élèves, dont soixante
garçons.
Courant septembre 2005, dans le cadre d’un « projet
pluridisciplinaire à caractère professionnel » (PPCP) sur
l’Europe, deux classes de première de baccalauréat professionnel ont
lancé l’idée de créer un blog sur le sujet.
Bien que dit « PPCP », ce projet ne respecte pas
certaines règles propres au dispositif institutionnel. En effet,
il s’agit d’un groupe d’élèves issus de deux classes, non admis en
section européenne. En outre, il n'y a pas à proprement parler
d’objectifs professionnels ni d'implication d'enseignant du secteur
professionnel. Au total, l’équipe pédagogique est composée de quatre
enseignants : une enseignante de lettres-anglais, un enseignant
de maths-sciences et deux documentalistes.
L’utilisation d’un blog pour le montage d’un
projet d'échange interculturel s'intègre parfaitement au projet
d'établissement, avec la triple volonté de :
§motiver les élèves les plus en difficulté et les
amener à davantage de rigueur dans l'utilisation de la langue ;
§donner accès à la culture et à la connaissance de
l'autre pour un apprentissage de la tolérance ;
§responsabiliser les élèves vis-à-vis de
l’utilisation d’Internet mais aussi par rapport à des délais et à des
critères de qualité.
En soi, l'utilisation d'un blog permet d'aborder
des objectifs techniques et juridiques ; la dimension d'échange avec
des élèves étrangers permet d'y ajouter des objectifs interculturels,
enfin nous avons souhaité faire travailler les élèves sur la
correction de la langue avec de surcroît quelques objectifs
documentaires. L'étendue du projet sur l'année permettait de
travailler selon une pédagogie de projet responsabilisante et de
traiter certains aspects citoyens.
Les PPCP ne sont pas soumis à une évaluation notée mais
« seulement » à une appréciation. Ce « seulement »
ne vaut évidemment pas pour nous enseignants, mais pour les élèves car
cela influe généralement négativement sur la motivation. Restait à
voir si la tâche seule pouvait motiver les élèves.
1.2 Les partenaires extérieurs à l'établissement
Eurosphère est présenté dans sa page d'accueil comme le blog des
échanges lycéens, un espace à travers lequel nos élèves souhaitent
susciter de nombreux commentaires de la part d’autres jeunes de leur
âge (16-20 ans) des quatre coins de l’Europe. Le nombre de participants n’était donc pas limité, bien
au contraire, mais trouver des lecteurs n'était pas suffisant, il
fallait surtout trouver des partenaires « actifs » qui
interviennent régulièrement sur le blog et souscrivent au projet dans
la durée.
Le blog ne pouvait avoir de sens et d'intérêt que si :
–il était alimenté régulièrement ;
–il suscitait des réactions ;
–ces réactions étaient lues et faisaient éventuellement
l’objet d’un commentaire.
Nous avons donc songé à contacter des professeurs
de français langue étrangère (FLE) désireux de travailler avec leurs
élèves sur la compréhension et d'expression écrite, la compréhension
interculturelle, l'écriture créative et bien entendu, la maîtrise de
certaines compétences informatiques. La communication sur le projet a été lancée par les
professeurs-documentalistes avant même la création du blog par le
biais de listes de diffusion et sites spécialisés en Français langue
étrangère.
Dès le lancement du blog, trois établissements ont
participé à son alimentation : une classe slovène (Lycée de Nova
Gorica), une classe espagnole (IES, Val Minor, Galice) et une classe
roumaine (Collège Gheorghe Asachi, Botoşani). Après les vacances de
Noël, le rythme des participations s'étiolant, un nouvel appel a été
lancé, à l'attention des professeurs qui s'étaient dit intéressés par
le projet lors de son lancement, mais qui n'avaient finalement pas
donné suite à leur demande. La visite du blog et des articles,
commentaires et albums-photos existants a sans doute créé une
émulation puisque quelques jours après cet appel à contributions, deux
nouveaux partenaires étaient actifs sur le blog : une classe italienne
(Lycée Leonardo da Vinci, Alba) et une classe d'étudiants en première
année de l'Université de Léon (Espagne). Une deuxième classe de
Roumanie a rejoint le projet fin janvier 2006 (Collège économique
« Dimitri Cantemir », Suceava).
2. Le
déroulement du projet
2.1. Initiation à la blogosphère et mise en ligne du blog
Notions de droit
Les deux enseignants de discipline ne possédant que peu de
connaissances préalables sur les blogs se sont donc adressés aux
professeurs documentalistes en tant que spécialistes des TICE pour
préparer la première séance.
Cette séance s’articulait autour d’un questionnaire qui
visait à s’assurer de la familiarisation de tous les élèves au média
« blog », d'étudier la représentation qu'ils en avaient
spontanément (les élèves devaient donner leur propre définition), puis
de les sensibiliser à certains aspects probablement ignorés à notre
avis - et la suite nous a donné raison - : notions lexicales autour du
terme « blog », origine du phénomène, fonctionnement et
contenu possible d'un blog, notions de droit.
Il est ressorti de ce questionnaire une méconnaissance assez
générale des cas médiatisés d'exclusion d'élèves pour propos
malveillants ou photos volées dans des blogs, mais surtout une
méconnaissance des règles en vigueur sur Internet et une confusion
flagrante entre « blog » et « Skyblog », la très
grande majorité des élèves ne voyant dans un blog que l'aspect
« album-photos ».
Lors de la séance suivante, nous nous sommes appuyés sur les
conditions d'utilisation et les divers messages de prévention des Skyblog pour voir quels
procédés l'hébergeur avait mis en place pour se protéger juridiquement
d'éventuels « dérapages » de la part de ses membres.
Charte et hébergeur
A partir d’exemples de chartes existantes trouvées sur
Internet, les élèves devaient compiler les points abordés et lister
les items à retenir pour leur propre charte.
Les professeurs ont révisé la
Charte proposée, classé les différents points, ajouté quelques
éléments de détail et spécifié les sanctions auxquelles s'exposerait
un rédacteur en cas de non respect de la charte ou un lecteur qui
aurait posté un commentaire indésirable.
En définitive, les différents points retenus pour les élèves
ont été publiés sur une partie fixe du blog et un document a été signé
en double exemplaire par chacun des élèves de la classe.
Choix d'un hébergeur
Nous souhaitions impliquer les élèves dans le choix de
l'hébergeur. Pour tous, les blogs se limitaient aux Skyblogs
: il s'agissait de leur montrer que pour notre projet, un autre
hébergeur s'imposait.
A partir de la consultation de blogs présélectionnés, les
élèves devaient remplir une grille de comparaison entre les deux
hébergeurs « skyblog.com » et « hautetfort.com ».
Cette grille permettait de montrer clairement quel hébergeur
permettait de créer les blogs les plus ergonomiques et offrant le plus
de fonctionnalités.
Les élèves ont également observé un certain nombre de blogs
d'élèves et de blogs de classe afin de comprendre ce qu'on pouvait
attendre d'eux et quelles possibilités l'utilisation d'un blog allait
leur offrir.
Création du blog
Nous avions demandé aux élèves d'émettre des propositions de
titre et de sous-titre, lesquelles ont été soumises au vote de la
classe et des professeurs, avec la contrainte d’utiliser un ou
plusieurs des termes suivants : collaboration ou échanges – jeunes –
Europe – thèmes des notes et des échanges. Immédiatement après le
vote, le blog a été mis en ligne par les professeurs-documentalistes
tandis que les élèves rédigeaient en groupe les premiers textes de
bienvenue et de présentation.
Au départ, la motivation était très faible. Seuls quelques
élèves se sentaient impliqués par le projet lors de son lancement.
Nous avons considéré que le respect des conditions suivantes
permettrait de les impliquer davantage :
–Choisir des thèmes fédérateurs pour les jeunes ;
–Varier et alterner les modes de travail (travail de
groupe, travail individuel, travail de recherche documentaire, etc.) ;
–Varier les tâches demandées (comptes-rendus de visites
ou de lectures, recherche d’information, écriture créative, etc. ;
Nous avons élaboré un premier calendrier de thèmes à traiter
en considérant qu'il fallait partir des intérêts les plus proches des
élèves jusqu'aux plus éloignés. Les articles ont été ainsi tout d'abord été
centrés sur l’environnement immédiat des lycéens pour permettre de
découvrir les différents élèves, la ville de Molsheim et certains
villages alentours, Strasbourg, le lycée, etc.
Les sujets abordés par la suite devaient toucher
l’univers des jeunes et leur vie quotidienne : les loisirs, l’école,
les relations garçons/filles, etc. ; mais aussi des sujets plus
larges comme l’Europe, les traditions et les coutumes du pays ou
encore la place des jeunes dans la société.
Malgré tout, les élèves se sont peu investis dans la
publication des articles ou la rédaction de commentaires en dehors des
créneaux horaires PPCP, ce qui est dommage puisqu’il s’agissait de la
condition sine qua non du bon fonctionnement du blog.
Ainsi, la majeure partie des séances a dû être consacrée à
la lecture des nouveautés du blog (articles, commentaires ou
albums-photos) et à l'émission d'articles ou de commentaires en
retour.
Plusieurs idées de micro-projets ont émergé et ont été
communiquées aux élèves puis maintes fois reportées voire ajournées,
parce que – justement - il paraissait plus urgent de donner réponse à
des questions posées par nos partenaires ou d'alimenter le blog qui
n'avait pas été actualisé depuis des semaines.
Dès le mois de novembre, nous avions envisagé de lancer une
séquence sur la conception d'un « Guide de la France
lycéenne » avec recensement des stéréotypes et des idées reçues
sur la France et les Français, accompagnés d'une confirmation ou d'un
démenti d'après l'expérience personnelle et la vision de nos lycéens
par exemple. Quelques séances de sensibilisation aux stéréotypes ont
eu lieu de novembre 2005 à janvier 2006, quiauraient dû être suivies par trois séances de travail sur les
stéréotypes d'après l'étude de documents, d'une séance dédiée au choix
des rubriques et d'une dernière séance de mise en page début janvier
2006. Or, nous n'avons commencé la phase de recherche documentaire et
de rédaction qu'en mars 2006. Un retard qui s'explique en grande
partie par le fait qu'il a été jugé plus urgent d'alimenter le blog
durant les séances puisque rien n'était fait par les élèves en dehors
des heures de cours.
C'est du côté de la citoyenneté et de l'interculturalité
que se situaient nos priorités durant ce projet.
Nous avons donc axé une grande partie des séances sur un
travail sur les stéréotypes et idées reçues sur la France et les
Français. La question « Quels stéréotypes sont fréquents dans
votre pays à propos de la France et des Français ? » posée sur
le blog a reçu beaucoup d'écho : les Italiens, les Espagnols et les
Roumains s'en sont donné à coeur joie en donnant leur opinion sur le
sujet. Une opinion dans la plupart des cas positive, et constituée
essentiellement de clichés qui n'ont pas suscité de grande réaction
de la part de nos élèves.
Nous avons par contre travaillé sur divers supports
extérieurs divers (extraits de blogs étrangers, extraits de guides
de voyages ou extraits de sites dédiés à l'enseignement de la
civilisation française pour les étrangers), dans lesquels les
opinions émises sont soit provocatrices soit fondées sur une image
de la France non actualisée, comme par exemple : le Français manque
d'hygiène ; le Français est constamment en grève ; le Français est
fier de sa langue et refuse de parler l'anglais ; le Français roule
comme un malade ; le Français emmène son chien partout et ne ramasse
pas ses crottes (!).
Dans l'ensemble, les élèves ont pris conscience du
processus qui mène à la formation de stéréotypes et d'intolérance
envers autrui. Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour
qu'une vraie tolérance s'installe. La tendance générale est à
l'ethnocentrisme et la norme reste l'habitude française.
De même, les élèves n'ont pas semblé s'intéresser
d'eux-mêmes aux pays d'origine de leurs correspondants. Tout au plus
était-ils intéressés par leur vie quotidienne, leur rythme scolaire,
leurs sorties et leurs relations amicales. L'aspect civilisationnel
du pays, les habitudes de vie de leurs concitoyens, leur intégration
à l'Europe et leur opinion à ce sujet n'a semble-t-il recueilli
aucun intérêt ou curiosité de façon spontanée.
3.2.
Les
apprentissages techniques et documentaires ?
Pour tous les élèves, même ceux qui possèdent un Skyblog, l'alimentation et la gestion d'un blog à travers un
hébergeur permettant la personnalisation d'un certain nombre de
paramètres était un nouvel apprentissage. Tous les élèves étaient
capables après plusieurs mois de saisir et de mettre en
forme un texte à l’aide d’un éditeur de texte simple, d’insérer une
pièce jointe, un document multimédia ou un lien hypertexte à l’aide de
l’éditeur de texte d’un blog.
Cependant, certains points liés à la navigation
dans l'espace public du blog n'étaient toujours pas clairs au
printemps. Les élèves avaient par exemple du mal à retrouver d'anciens
articles dans les archives. Certains n'avaient d'ailleurs pas vraiment
compris le système d'archivage mensuel ou le fait que l'on pouvait
paramétrer le nombre d'articles apparaissant sur la page d'accueil.
La notion de rubriques n'a également pas été
assimilée par tous les élèves. Ici aussi, le manque de curiosité des
élèves a été flagrant : peu d'entre eux se sont aventurés d'eux-mêmes
dans l'interface d'administration sans y être invités par l'équipe
pédagogique.
Malheureusement, nous avons peu travaillé sur des
activités telles que la recherche avec les outils de recherche en
ligne, la vérification de la fiabilité et de la validité
d’informations trouvées sur Internet ou encore l'analyse des
différents éclairages d'un même événement. Certains groupes ont eu à
trouver des informations relatives à la ville de Molsheim, à la région
Alsace, mais la plupart des travaux ont été effectués à partir de
documents préselectionnés à analyser car il nous paraissait par
exemple difficile de trouver aisément des clichés et stéréotypes sur
la France et les Français.
Nous avons assez insisté sur les droits et les
devoirs de l'internaute pour que les élèves respectent par la suite
les principes de la netiquette et soient capables d’identifier et de
respecter les règles déontologiques et juridiques liées à
l’utilisation d’un blog, et d’Internet en général : respect de la
vie privée, droit à l’image, droits d’auteur.
3.3.
Quelle responsabilisation et quelle attitude par rapport aux
savoirs ?
Diverses notions de responsabilité ont été abordées avant la
création du blog : responsabilité pénale et responsabilité
« éthique » bien entendu, mais également responsabilité vis
à vis du succès du blog par la qualité des propos qui y seront tenus
et l'interactivité qu'ils sauront y instaurer.
Nous avons vu que les élèves ont été impliqués à tous
les stades de la conception et de l’alimentation du blog, participant
:
au choix de l’outil : le blog ;
à l’évaluation de différents hébergeurs et à la prise de
décision sur l’hébergeur le plus adapté à un travail en classe, même
si ici le choix a été largement orienté par les enseignants ;
à la rédaction de la Charte ;
au choix du titre et sous-titre du blog ;
au choix des thèmes à traiter ;
à la cyber-brigade chargée de veiller au respect de la
Charte : deux élèves nommés chaque quinzaine.
Mais se pose la question de savoir jusqu'où les élèves ont
été véritablement « acteurs » de leurs apprentissages et
responsables de la réussite du projet. Les professeurs n’ont-ils pas
assuré un rôle de « filet » ? En effet, et
principalement dans l'optique d'encourager et de fidéliser les classes
partenaires, nous avons souvent dû nous-mêmes présenter les nouveautés
apparues sur le site et donner des consignes par rapport aux réponses
à apporter à nos correspondants.
Nous pensions que cette situation réelle de communication,
donnant une véritable importance au récepteur et la valorisation des
écrits par une visibilité sur le réseau, permettrait d'augmenter la
motivation, de façon quasiment « naturelle ». Or, il en est
allé assez différemment : même des écrits concernant les loisirs ou la vie
familiale leur semblaient encore être un exercice par trop scolaire.
Les initiatives personnelles, la créativité et le travail en autonomie
ont été quasiment inexistants. L'équipe éducative a été contrainte de
donner des consignes très précises, de faire le point avec les élèves
à chaque séance afin que les nouvelles interventions et documents sur
le blog ne passent pas inaperçus, les élèves semblant peu s'intéresser
aux nouvelles interventions de nos correspondants, et ne prenant pas
la peine de lire les écrits de leurs camarades. Le fait que les élèves
ne travaillent pas sur le projet en dehors des heures de cours a fait
perdre beaucoup de temps dans le déroulement des séances.
Par ailleurs, la faible participation de nos
élèves peut s'expliquer par le fait qu'ils se soient sentis complexés
à la lecture des interventions, souvent de qualité, de leurs
correspondants dont certains ont fait preuve d'une maîtrise de la
langue française supérieure à celle des nôtres.
Pour un enseignant néophyte, les étapes d’autoformation et
d’information préliminaires à la création du blog peuvent être
extrêmement chronophages. Il faut également s'attendre à un temps de
préparation des séances assez long car ce type de projets nécessite
une organisation très précise, en particulier dans la mise en oeuvre
du calendrier et dans la répartition des tâches.
Du point de vue pédagogique, il lui faudra mesurer les
limites de l’encadrement nécessaire dans un blog-classe et les limites
de l’autonomie des élèves, gérer et équilibrer les apports théoriques
et les moments de pratique avec des adolescents et apprendre à
« écrire ensemble » sur un blog.
Du point de vue technique, l'enseignant doit pouvoir choisir
un hébergeur en fonction d’un projet pédagogique et des
fonctionnalités souhaitées, il doit savoir utiliser l'interface
d'administration et les paramètres avancés des hébergeurs :
design, mise en page, nombre d’articles et périodicité de l’archivage,
attribution de droits administratifs. Certaines règles sont également
à connaître pour rendre un blog attractif et clair.
Enfin, du point de vue législatif, il est essentiel de
connaître toute la législation relative à l’utilisation des blogs à
l’école mais également les principaux éléments liés à la diffusion de
photos et d’œuvres d’élèves, à la propriété intellectuelle et aux
divers droits d'auteur.
L'équipe pédagogique devait-elle définir des thèmes de
réflexion et de débats ou laisser plutôt le libre-arbitre aux élèves
selon l’actualité et les envies de chacun ? Qui devait décider du
choix des rubriques ?
Nous nous sommes par ailleurs interrogés sur l'opportunité
ou non d'une modération des articles et des
commentaires postés afin d'éviter d'une part l'émission de
contenu indésirable mais également de trop nombreux relâchements
linguistiques.
Il fallait cependant veiller à ce que de moyen de
communication et d’ouverture, notre blog ne devienne pas un outil
d’oppression et de contrôle. Nous avons donc opté pour une solution
responsabilisante : du moment que la Charte était respectée, nous
n'effectuions pas de censure ni de correction a posteriori des articles. Les articles postés en dehors du lycée ne
devaient donc pas être corrigés. Par contre, dans le cadre des
séances, nous veillions à la correction linguistique des articles
avant qu'ils ne soient mis en ligne, ce que les élèves ont compris et
accepté d'autant mieux qu'ils se savaient lus par des élèves pour qui
le français était une langue étrangère.
Les élèves devaient par ailleurs prêter une attention
particulière au respect de la Charte d'utilisation. Pour faciliter le
contrôle des dérives et répartir les tâches, nous avons institué un
système de « cyberbrigade » assumé par deux élèves chargés
durant deux semaines de vérifier qu'aucune note ou qu'aucun
commentaire n'allait à l'encontre de la Charte.
Nous l'avons vu précédemment, dans le cadre des séances au
lycée, nous avons veillé à la correction linguistique des articles
avant qu'ils ne soient mis en ligne. Cependant, on regrettera que les
élèves n’aient pas fourni davantage d'efforts pour corriger leurs
textes, ni pour veiller au niveau de langue utilisé, parfois
incompréhensible pour un étranger.
Quelques rares messages ont tout de même été envoyés par des
élèves depuis leur domicile. Dans ce cas, nous n'exercions pas de
contrôle a priori de la correction linguistique du message.
On ytrouvait donc un
certain nombre d'erreurs mais par contre, nous n'avons pas eu de souci
relatif à une expression aussi relâchée que celle que l'on trouve
habituellement dans les Skyblogs
: pas d'écriture en phonétique ni d'abréviations. À aucun moment, ni
en classe ni à l'extérieur, les élèves n'ont essayé de pervertir le
blog en y publiant d'autres contenus que ceux demandés dans le cadre
du PPCP.
La participation des partenaires a en revanche été
en tous points positive : le blog a été très régulièrement alimenté
par l'une ou l'autre des classes.
Nous avons également reçu quelques interventions
de personnes « extérieures » au projet : certaines personnes
qui ont écrit dans le but de rentrer en contact avec des personnes
d'un pays partenaire ousouhaitent
en savoir plus sur notre établissement.
Relation pédagogique
Étant donné le caractère dynamique du blog et le potentiel
qu’il offre pour la communication, il serait bien dommage d’utiliser
cet outil dans le cadre d'une pratique pédagogique traditionnelle dans
laquelle l’enseignant reste la seule source d’information qui détient,
dirige et contrôle l'ensemble des savoirs.
L'utilisation d'un blog dans le cadre scolaire est optimisée
dans un contexte de pédagogie de projet : quel rôle l’enseignant y
tient-il ?
Avec Internet, il n’est plus le seul détenteur du
savoir : il doit gérer une croissante hétérogénéité de contenus
et de besoins pédagogiques. Il faut qu’il remette sa pratique en
question. Son rôle se transforme en celui de tuteur et médiateur.
Le blog étant un outil qui invite au dialogue, le professeur
qui initie un projet avec ce média doit également vouloir travailler
en collaboration avec les élèves, en équipes et établir un climat
propice, une atmosphère de respect, de partage et d'expérimentation
pour créer des situations d'apprentissage variées permettant aux
participants de développer leurs aptitudes à faire des choix.
En conclusion, chacun des professeurs impliqués dans
un tel projet devrait posséder les compétences suivantes :
§une certaine souplesse pédagogique et un intérêt pour la
remise en question de ses pratiques ;
§la volonté de travailler en équipe ;
§une ouverture à la critique, à l'émission d'idées
différentes des siennes ;
§un minimum de culture technologique, c'est-à-dire non pas
des compétences techniques très poussées ; mais plutôt une intuition
des outils et fonctions nécessaires pour un projet et des objectifs
donnés.
L'implication des professeurs documentalistes
Par ailleurs, l'utilisation d'un tel outil modifie-t-elle la
mise en oeuvre d'un partenariat professeurs de discipline et
professeurs-documentalistes ?
De plus, au cours des diverses séances de recherche, le
professeur fait connaître à ses élèves les différentes sources
d’information. Il les guide dans le repérage, la sélection et
l’analyse de l’information. Il les conseille, valide leur production
pour une éventuelle publication, etc. Ne reconnaît-on pas là les
compétences du professeur-documentaliste, familiarisé au rôle
d'accompagnateur et de médiateur ?
Travail d'équipe
Il faut aussi se donner du temps pour partager, collaborer
et expérimenter ce qui n’est pas toujours facile dans le système
éducatif tel qu’il existe actuellement avec ses horaires et ses
contenus fragmentés.
L'expérimentation relevée ici a souffert d'un manque de
concertation entre professeurs. Dans ce type de projet sur l'année, il
aurait été judicieux d'intégrer davantage le reste de l'équipe
pédagogique en charge des classes concernées. Ceux-ci auraient pu dans
le cadre de leurs programmes respectifs reprendre l'un ou l'autre des
aspects traités dans le blog. Le professeur de lettres aurait pu par
exemple travailler sur la rédaction de certains articles en dehors du
seul créneau horaire réservé au blog ou travailler sur certains
prérequis. Dans l'exemple d'Eurosphère, tout un travail sur les
clichés et stéréotypes aurait pu être mené avec des professeurs de
lettres ou d'histoire-géographie.
Alimentation : projets classe – contributions ponctuelles /
journal scolaire
Supports d'échanges avec les mêmes / nouveaux partenaires
Si la création d'un blog s'avère relativement simple d'un
point de vue technique, l'alimentation d'un blog à plusieurs nécessite
par contre une gestion et préparation extrêmement rigoureuse des
séances avec répartition des rôles, variété des tâches proposées et
clarté des objectifs comme du planning. Elle nécessite également une
grande rigueur dans la concertation et une optimisation des
compétences de chacun des membres de l'équipe pédagogique.